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21/05/2015

La loi Macron et la réforme des Prud'hommes : une grande mystification

conseil prudhomme.jpgM. Macron, en toute bonne foi certainement, a cru que le problème des Prud'hommes était un problème de délais.

Outre que le problème n'est certainement pas là : si les salariés veulent un jugement rapide, c'est beaucoup moins vrai pour les employeurs, puisque 98% des affaires sont introduites par des salariés.

La perspective d'être condamné vite et donc de devoir payer vite n'enthousiasme pas celui qui doit payer (toujours l'employeur) et donc n'encourage pas l'emploi, d'autant plus que le taux de condamnation de l'employeur est inévitablement important au regard de la complexité des lois sociales.

Le vrai problème du chômage et donc de l'embauche, c'est le Code du Travail.

Mais reprenons les vrais chiffres du Ministère de la Justice sur les Prud'hommes (source : justice/portail/les statistiques 2013 et 2014).

La justice prud'homale serait encombrée un peu plus que les autres. Cela pourrait s'expliquer, si c'était vrai, par le nombre considérable d'affaires qui lui sont soumises en 2013 par rapport à 2012, l'augmentation des affaires devant la justice française a augmenté de 3,5 % tandis que l'augmentation des affaires devant les seuls Prud'hommes a cru de 17 %. Selon les statistiques judiciaires, la durée moyenne d'un contentieux prud'homal serait de 13,7 mois contre 11,7 mois devant la Cour d'appel ou de 9,3 mois devant le TGI. Ces statistiques sont faussées par plusieurs phénomènes dont M. Macron n'a pas tenu compte :

- c'est d'abord le taux considérable d'affaires qui finalement ne sont pas jugées (44 % !) en raison soit du désistement des parties (17 %), désistement causé tant par la conciliation que par les accords intervenus entre le bureau de conciliation et le bureau de jugement, soit de radiation ou autre décision avant jugement causées par l'abandon des parties, souvent après un accord dont le juge n'a pas connaissance. Sur 155 254 affaires terminées, 67 755 l'ont été avant qu'un jugement intervienne, soit 44 % !.

- c'est ensuite l'attrait extraordinaire de cette justice d'accès gratuit, connu (88 % des Français la connaissent contre 54 % pour les TGI par exemple) et facile d'accès qui fait moins peur que d'autres et où l'avocat n'est pas obligatoire.

- c'est aussi une justice qui coûte très peu à l'Etat : l'aide juridictionnelle pour les affaires de droit du travail ne représente que 2,7 % de la totalité des affaires nouvelles aux Prud'hommes (205 000 affaires) contre 7 % pour les autres (2 761 000 affaires). Quant aux conseillers prud'homaux, leur indemnité est de 7 à 14 € de l'heure et représentent 1 % du budget du personnel de la Justice alors qu'il y a 14 512 conseillers sur 31640 juges en France !

Il convient enfin de noter que, contrairement à ce qui est dit,  le taux de confirmation et d’infirmation en appel est identique en matière sociale et dans les autres matières étant souligné que les chefs de demandes sont multiples et qu’une décision peut être confirmée en son principe mais réformée sur certains détails des différents chefs.

Et on notera que la part des jugements qui font l'objet d'un départage n'est que d 'environ 13 %, chiffre constant d'une année sur l'autre.

En conclusion : une loi qui est fondée sur de mauvais chiffres ne pourra donner que de mauvais résultats.

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